• 807

    Enrique transpire il ôte son chapeau et passe la main sur ses quelques cheveux collés par la sueur ce geste replace une mèche sur sa calvitie devenir chauve pense-t-il c'est voir crever l'enfance et lorsqu'il se peigne il imagine la mort qui le frole d'un mouvement prompt il remet son chapeau et pousse le portail de l'entreprise la matinée commence par l'usinage d'une série de pièce auto les odeurs d'huile lubrifiante et de copeaux de fer rouge se répandent comme la fumée d'un bâton d'encens sur une éponge le patron se pointe accompagné d'un gamin maigrelet coiffé d'un turban Enrique je vous présente Reda vous le formerez l'ouvrier se retrouve devant un jeune hindou qui sollicite déjà les premières consignes Enrique ressent un profond malaise et déclare le regard fixé sur le haut de la tête du stagiaire que le port de ce tissu est incompatible avec le métier de tourneur fraiseur l'immigré dénoue la bandelette et laissa répandre une chevelure ondulée de vagues noires Enrique écarte le jeune garçon l'ennemi d'un geste brusque ce dernier heurte la machine qui avale les 60 cm de cheveux épais jusqu'à atteindre la peau du crâne Enrique est immobile devant le miroir de la salle de bain il observe son reflet sa main droite plonge dans la poche du pantalon et elle en tire une masse de cheveux noirs tachés de sang Enrique les dépose sur son front dégarni ses yeux deviennent brillants un sourire passe en ombre car pour la première fois depuis des millénaires il se trouve beau